Publication en Biologie Marine - Équipe Écophysiologie et Écologie

La résistance au blanchissement des coraux pourrait dépendre du niveau de nutrition des micro-algues symbiotiques

L’équipe d’Écophysiologie du CSM étudie l’impact des paramètres environnementaux sur différentes espèces de corail. La plupart des coraux constructeurs de récifs vivent en symbiose avec une micro-algue qui se trouve à l’intérieur même de certaines cellules de l’hôte animal. Les changements climatiques liés aux activités humaines ont un impact majeur sur les récifs coralliens, avec pour conséquence la rupture de la symbiose qui provoque le blanchissement des coraux et très souvent leur mort. Ainsi, de nombreuses études actuelles essaient de mieux comprendre les mécanismes qui conduisent au blanchissement corallien. La nutrition est notamment un facteur qui permet aux coraux de résister au blanchissement, bien que les mécanismes qui entrainent cette résistance sont encore méconnus. Le but de cette étude était donc de comprendre ces mécanismes.
 
Les coraux symbiotiques, qu’ils soient tropicaux ou tempérés, bénéficient de plusieurs sources d'alimentation. D’une part, les micro-algues produisent, grâce à la photosynthèse, des éléments nutritifs tels que le glucose (autotrophie), d’autre part, les tentacules urticants des coraux leur permettent de capturer et de consommer des proies comme le plancton (hétérotrophie). Les produits issus de la digestion des proies, et plus précisément les acides aminés, profitent également au développement et à la croissance des algues photosynthétiques, par suite d'échanges permanents de composés nutritifs entre l’hôte animal et les micro-algues photosynthétiques au sein de la symbiose.

L’utilisation d’une technique de pointe appelée « Compound-specific isotope analysis » (CSIA) permet de mesurer le rapport isotopique de l’azote (d15N) de chaque acide aminé constitutif de l’hôte animal et de la micro-algue. L’information recueillie par ces mesures nous fournit des détails précis sur la nature des échanges entre les deux partenaires de la symbiose et nous permet ainsi de savoir si un corail transfère de la nourriture aux algues pour résister au stress de température.

Notre étude a comparé un corail tropical, Turbinaria reniformis, à un corail méditerranéen Oculina patagonica. Ces deux espèces ont été choisies, entre autres, à cause de leur différente sensibilité au blanchissement, l'espèce méditerranéenne étant moins sensible que l'espèce tropicale. Nous avons pu mettre en évidence que lorsqu’il ne bénéficie que de la nutrition hétérotrophe, le corail Oculina patagonica transfère la quasi-totalité des acides aminés issus des proies à ses micro-algues symbiotiques, alors que le corail tropical n’en transfère que deux. Cette différence pourrait expliquer la plus grande aptitude du corail méditerranéen à résister au blanchissement. Ce travail ouvre la voie à d’autres recherches qui devraient élargir le champ des connaissances relatives à l’importance de la nutrition sur l’endurance des coraux face aux épisodes de blanchissement associés au bouleversements environnementaux.

Publication :
Martinez S., Grover R., Ferrier-Pagès C. Symbiont starvation affects the stability of the coral-Symbiodiniaceae symbiosis. Frontiers in Marine Science, 13 Septembre 2022, 10.3389/fmars.2022.979563

 
Pour plus d'informations, veuillez contacter :
Dr Christine Ferrier-Pagès
Dr Renaud Grover